Randonnée en refuge non gardé | 4 jours dans le Jura en hiver

Dans cet article, je vous invite à me suivre dans une randonnée traversant le massif du Jura. Partant du village de Foncine-le-Haut, elle permet d’arpenter les douces collines de la partie Nord du Haut-Jura, jusqu’au paysage montagneux de sa partie Sud. Arrivé sur le faîte des dernières montagnes, elle permet un point de vue grandiose sur la chaine des Alpes, le massif du Mont Blanc et le lac Léman. Réalisé en janvier, son cheminement sera concomitant à la progression de l’hiver, et à son lot de difficultés associées…

Départ de Foncine-le-Haut

Foncine-le-Haut est un petit village du Haut-Jura, situé à 860 mètres d’altitude. Enraciné dans un paysage rural, il est situé non loin de la source de la Saine, point remarquable de la région à l’apparence d’un petit cirque naturel. La rivière dégringole les pentes avant d’entailler le plateau calcaire aux gorges de Malvaux.

Nous partons par un maigre chemin sinuant sous les frondaisons. Dans la partie Nord du Haut-Jura, le paysage se constitue de légères collines, ce qui l’apparente à un champ de bosses de très grand format. Les collines herbeuses déploient un vert fade hivernal, mais le vert profond des épineux permet de donner l’accent au décor.

Suivant le cours de la Saine, nous parvenons à la partie basse du village. Nous croisons un moulin ancien, dont la roue est drainée par la  rivière qui nous sert de guide. Pour parvenir aux gorges, il faut franchir le faîte d’une colline, arpenter un plateau, puis traverser des bois touffus par un chemin boueux.

Foncine-le-bas

Le belvédère des quatre lacs

Une fois parvenu au fond des gorges, on peut admirer un pont ferroviaire porté par de belles arches en pierre. Une courte ascension est encore nécessaire pour arriver au belvédère des quatre lacs. Le point de vue se niche au sommet d’une falaise. Il est idéal pour contempler le Lac de Narlay, le plus au Nord ; celui de Maclu accompagné de son petit frère, le petit Maclu ; et le lac de la Motte, le plus imposant, qui dispose de son ile où une maison isolée y a pris place. Plus  à l’Ouest, le petit village du Frasnois est suivi d’une ondulation forestière à perte de vue.

Les refuges non-gardés

Il est 17h30 et le soleil se couche. Heureusement, une petite cabane se trouve dans la profondeur des bois, un peu plus haut sur la colline. C’est de nuit et à la lampe frontale que nous allons l’atteindre.

La cabane du Prélet fait partie de la multitude de refuges couvrant le territoire français. La région du Jura en compte un très grand nombre, dont certains sont dit « non-gardés ». Ils offrent l’asile aux promeneurs. La formule est assez simple : un toit, un poêle et du bois, des tables et des tabourets, et un sol sec où installer ses affaires.

Selon le refuge, on trouvera une diversité d’aménagements. Certains ne se limitent qu’à un toit et quatre murs. Un site permet de consulter l’intégralité des refuges et leur position sur une carte. Il s’agit d’une belle manière de passer une nuit isolé dans les bois, si tant est que vous être le seul à y faire halte. En cette première semaine de janvier, l’hiver rigoureux semble avoir dissuadé la plupart des randonneurs.

Montée en altitude

Le matin se lève et la lumière perce la frondaison. Un petit parapet de neige durcie se dresse au côté du refuge. Le calme est exceptionnel. L’hiver fait tomber un silence de plomb sur le forêt. La caresse du vent sur les branches compose le seul murmure qui nous vient du bois.

La randonnée continue dans un paysage de tourbières et de collines. Nous pénétrons bientôt dans une forêt. Elle couvre une pente qui s’avère plus forte qu’auparavant. L’altitude augmente et les dénivelés se ressentent davantage dans les jambes. Arrivé sur la crête, l’épaisseur des bois  se précise. Nous ne croisons aucun randonneur. Les plaques de neige gelées se font de plus  en plus fréquentes, jusqu’à recouvrir l’intégralité du sol. La progression peut devenir ardue si l’on ne possède pas l’équipement adapté. 

Quittant la forêt, nous débouchons sur une grande vallée ondulée, mais dont les reliefs sont plus marqués. L’hiver fait peser une chape de froid sur le décor. Le paysage est un enchainement de buttes boisées et de vallées où se situe généralement un village. Nous traversons une seconde éminence avant d’arriver à la prochaine étape.

Le Village de Bellefontaine

Ce petit village, visible dès la sortie de la futaie, a tous les aspects d’une station de ski familiale. Cela est confirmé par les couloirs  déboisés sur la colline d’en face, dont on devine les téléphériques. Notre logement, le chalet Bonnefoy, se trouve à son sommet, un peu plus au sud. Son altitude a considérablement augmenté, et les pentes ont une propension à devenir des falaises. La nuit tombe, et nous décidons de faire de l’auto-stop jusqu’au bas du chemin le plus sécurisé.

Plongée dans l’hiver

Si l’ascension nous fait prendre une pente douce, elle est rendue difficile par la tombée soudaine d’un déluge. Une dizaine de minutes suffisent à tremper l’intégralité de nos corps. Bien que protégés par des vêtements imperméables, le froid amplifie l’humidité ressentie. Nous nous arrêtons dans un lieu-dit où se situe une grande bicoque, et dont une étable nous sert d’abri. Tout à coup, un instant magique s’opère sous les insistances du froid mordant. Le déluge humide et bruyant se fige, et dans un grand silence aussitôt recouvert, les gouttes d’eau deviennent flocons. Petit à petit, le monde se drape de soie. On distingue bientôt les crêtes voisines et les fonds de vallée. Cinq minutes auparavant, il était encore exclu d’y voir à plus de dix mètres devant soi.

La marche devient plus aisée mais le trajet est encore long. Le sol commence à s’épaissir, nous contraignant à de plus grandes enjambées. La route perd en lisibilité. Chaque pas sur la neige immaculée laisse derrière nous les premiers foulements humains  sur le sol neuf.

Le marcheur de l’hiver évolue dans un univers bien différent de celui des belles saisons. Le froid consolide son emprise sur le monde. Il est d’autant plus rude à affronter qu’il s’accompagne d’une humidité insidieuse. Les corps sont trempés, mais il est difficile de trancher sur la cause, entre la neige fondue ou la sueur de la marche. Nous atteignons le chalet avec peine, et le terme de refuge n’a cette fois-ci jamais aussi bien porté son nom.

La station des Rousses

Le Jura est connu pour ses hivers rigoureux. Des records de températures lui ont valu le surnom de petite Sibérie. Heureusement, le bon matériel emporté a permis de passer l’épreuve du froid que nous soumettait la nuit. En ouvrant la porte du refuge, le paysage a complètement changé de visage. Les chutes de neige ont cette magie de la transformation. Rien n’est plus  éclatant qu’un paysage enneigé sous un ciel bleu. Au regard de l’atmosphère grisâtre des premiers jours, le contraste est saisissant.

L’objectif du jour est d’atteindre la vallée de Morbier, de Morez et des Rousses, de prendre un embranchement vers le sud, puis d’atteindre le col de la Faucille. Quittant le refuge, nous progressons sur les pentes du versant Est. Le paysage prend des airs de montagnes. L’altitude ne dépasse pourtant pas les 1700 mètres. Cela n’empêche pas au village des Rousses d’être une station de ski attractive. Elle possède ainsi son panel d’hôtels, restaurants et d’infrastructures de sports d’hiver.

Le col de la Faucille

Nous profitons de la vallée pour nous diriger vers le Sud, suivant le cours de la Valserine, dans le Val des Dappes. Nous traversons ainsi la partie Sud du Haut-Jura en restant à une altitude modeste. S’ensuit l’ascension de la réserve naturelle de la haute chaine du Jura, ce qui permet d’atteindre le col de la  faucille.

Nous voici arrivés sur le dernier contrefort jurassien. S’y trouve le point culminant, le crêt de la neige, haut de 1720 mètres. Le col permet la traversée de l’élévation jusqu’au pays de Gex.

Les cimes des dieux

Le jour suivant offre une visibilité exceptionnelle. On distingue par la fenêtre donnant sur l’Ouest l’accumulation des crêtes montagneuses, disposées parallèlement. Nous avons définitivement quitté la terre des collines, mais les altitudes restent suffisamment basses pour que les conifères, recouverts  de sucre glace, y perpétuent leur hégémonie.

Au détour d’un chemin enneigé, la frondaison laisse vide à un grand espace. On y distingue alors les véritables maitres des lieux. Face à nous, les Alpes. Ce royaume de roche et de neige éternelle nous rappelle ce que le mot montagne veut dire. Le massif du Mont blanc, trônant au centre, a une carrure si imposante qu’il parait proche. Il est en réalité à trois fois la distance que nous avons abattue en 3 jours et demi. 

Pour entreprendre la descente, nous suivons les pylônes d’une ligne à haute tension, profitant de l’ouverture forestière. Quittant la route, nous parvenons à une clairière à la position exceptionnelle. C’est un véritable balcon panoramique, une ouverture sur le vide. La corniche permet de contempler le versant Est de la dernière crête du Jura. Magnifique, elle concurrence vaillamment les édifices grandioses qui lui font face. Mais les Alpes demeurent le clou du spectacle. La visibilité hors norme permet une rare clarté de ses détails. On y distingue les ravins, les dépressions, les cols, les plateaux, et la multitude de ses pointes piquant la voute céleste. Une terre poussée vers le ciel. Un somptueux rappel du grand fracas tectonique qui a cours dans ses soubassements.

Entre les deux, les plaines verdoyantes du pays de Gex sont prolongées par le canton de Genève. La cité est inondée de lumière. Elle borde l’immensité du Lac Léman, dont on ne distingue que la pointe du croissant. Le chatoiement du soleil transforme sa surface aquatique en kaléidoscope, et ses rayons se répandent sur les hauteurs encerclant la vallée.

Le massif du Jura
Face à celui des Alpes

Le pays de Gex et arrivée à Genève

Nous poursuivons notre perte d’altitude, jusqu’à atteindre le pays de Gex. La commune, réputée pour son fromage bleu, abrite la ville éponyme. Ses façades colorées et ses toits de tuiles  ocres rappellent les villages du Sud, signal que le Midi de la France n’est pas loin. Genève n’est plus qu’à quelques dizaines de kilomètres. Y arriver nécessite de traverser un espace périurbain important. Il est cependant possible de prendre un bus sur une ligne locale pour atteindre la ville.

Nous faisons nos adieux aux montagnes pour progressivement arriver dans un centre-ville moderne. En réalité, à Genève, les sommets ne sont jamais loin. Ils  pointent le bout de leur nez chaque fois que la ville laisse suffisamment d’espace au regard du promeneur. Partant du froid silencieux des hauteurs, nous voici dans un univers de métropole bouillonnante. Voilà le genre de contraste qui rend un périple mémorable…

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