Alghero : à la rencontre de l’héritage catalan de la Sardaigne

Au Nord-ouest de la Sardaigne, face à une baie, se niche un amas de maisons. Blottie contre son rempart marin, Alghero était autrefois une place-forte de l’empire de Charles Quint. Lui-même aurait déclaré, déboulant avec son armada, « Bonita y ben assentada ! », « gracieuse et bien solide ! ».

La ville fut prise lors de la conquête catalano-aragonaise de la Sardaigne en 1323. Les Sardes du coin y subirent un processus d’assimilation, si bien que des siècles plus tard, y perdure toujours un parler ancestral catalan. On peut en avoir le cœur net en assistant à la messe du soir, se donnant tous les dimanches dans la cathédrale.

Lorsqu’on découvre la ville, les rues ronronnent d’une clameur de vendredi soir. Ça crie dans les terrasses de restaurant bondées. On circule sur la courte bande de pavé qu’elles ont bien voulu laisser aux piétons. Ici, la fête a pignon sur rue. On festoie, on chante, on palabre au grand air. Le dynamisme caractérise cette petite ville du Nord-ouest, parenthèse bruyante dans le calme religieux de la Sardaigne.

Alors, Alghero, vivier d’un parler catalan archaïque ?

On entend bien chanter la langue hispanique à chaque coin de rue, mais il semblerait qu’elle provienne de touristes originaires du continent. Rien de vraiment catalan (si tant est que je parvienne à faire le distinguo), encore moins d’archaïque. Quand bien-même, la surreprésentation des habitants de la péninsule laisse penser qu’il demeure une certaine affinité avec cette petite ville. D’ailleurs, les couleurs de son drapeau ne trompent pas : du rouge et du jaune, et son surnom « la petite Barcelone sarde » n’est là que pour confirmer l’affiliation.

Le parler local et authentique existe bel et bien, partout dans la région. Il est loin d’être une légende, mais difficile de l’identifier dans un spot touristique le vendredi soir.

La promenade en bord de mer

Les petits murs de la ville constituent aujourd’hui un genre de digue. Les canons y sont toujours en position, de même que quelques trébuchets, prêts à tirer dans le vide. Ils témoignent du rôle de fortin qu’endossait la ville à une certaine époque. Autrefois, les boulets ont pu atteindre autre chose que l’étendue bleue, exemplairement des navires génois et vénitiens.

Ces remparts ont aujourd’hui changé de fonction, et ont opté pour l’option pacifique de la promenade en bord de mer. Il est très agréable de les parcourir au crépuscule. Ils partent du Sud, à la Torre di Sulis et se terminent à la Porta a Mare, marquant l’entrée du port, qui abrite une variété de voiliers et de bateaux de plaisance dans une grande marina. Le rempart est ponctué de quelques tours, comme la Torre di San Giacomo et la Torre di Sant’Elmo.

Le centre historique d’Alghero

Quittant la vue sur mer, on peut déambuler dans des rues pavées. Les façades de pierres beige et blanche caractérisent la ville. Parfois, on aboutit sur une place, comme la Piazza Civica, que les Algheresi occupent comme on occuperait un salon. Tel un clin d’œil fait la vivacité napolitaine, ici, la vie se déploie au grand air, et les espaces intérieurs semblent trop ennuyeux pour les habitants.

D’autres places mettent en scène les édifices de la ville. Ainsi découvre-t-on, dans l’exiguïté de la Piazza Ginnasio, l’église San Michele, dont le dôme polychrome était visible depuis les sinuosités de la Strada Bosa-Alghero.

La cathédrale di Santa Maria se trouve adossée à la Plaça de Santa Maria, alors que son clocher toise la Via Principe Umberto. De cathédrale, elle ne semble avoir que le nom, vu son aspect de petite église de village. Pourtant l’édifice est plus grand qu’il n’y parait, et il suffit de pénétrer en son sein pour s’en convaincre.

L’église de San Francesco, elle aussi, est encaissée dans l’amas de constructions. On la croise au coin d’une rue comme on croiserait n’importe quelle maison, à ceci prêt qu’elle arbore des rosaces. Au passage de son portique, on passe d’une rue étroite à une large nef. Ces édifices sont des créateurs d’espace.

le Capo Caccia

Depuis les remparts d’Alghero, on distingue un long bras de mer qui ceinture la baie. Au bout du bout, une falaise rocheuse, coiffée d’une construction blanche qu’on serait bien en peine d’identifier.

Il est possible de s’y rendre en voiture, en roulant 80km depuis Alghero. On traverse alors le domaine vinicole de Sella et Mosca, et la région du parc naturel di Porto Conte, proposant, encore et toujours, l’intarissable mélange de la roche et du maquis.

Arrivé au Capo Caccio, vue splendide sur le golfe de Porto Conte, où Alghero n’est plus qu’une tâche brune. Quant au bâtiment blanc perché sur son pic, la surprise est totale : il s’agit d’un phare !

En contrebas, se trouve la Grotto di Nettuno, la « grotte de Neptune », dont la cavité recèle les eaux du Lago Lamarmora. Sacré spectacle que ce lac souterrain. La surface de l’eau, en parfait miroir, invente des tableaux d’une impeccable symétrie, où les tites et les mites des stalak s’amusent à intervertir leurs rôles.

Où avons-nous dormi ?

Pour être tout à fait honnête, dans une tente sous un pont. Celui de la Spiaggia del Cavalcavia. Un spot qui comporte autant d’avantages que d’inconvénients. Points faibles : une grosse construction bétonnée au-dessus de nos têtes, et le barouf constant des voitures qui la traversent. Points forts : une magnifique plage et des eaux turquoise, offrant une matinée pour nous réconforter de la piteuse nuit.

Sinon, il existe quelques coquettes chambres dans la vieille ville d’Alghero, ainsi qu’une multitude de camping au bord de la baie. Il serait donc dommage de ne pas passer par cette charmante ville si d’aventure vous vous trouveriez dans les environs.

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3 commentaires

  1. Merci pour cet article qui donne envie de découvrir ce coin ! Je ne connaissais pas ce coin d’Italie mais j’ai bien envie d’y faire un tour.

  2. Super chouette lecture, j’y étais avec l’auteur et les souvenirs remontent. Seule interrogation concernant le passage: « On entend bien chanter la langue hispanique à chaque coin de rue. » Ne dit-on pas habituellement que l’italien chante, tandis que les langues hispaniques se démarquent par leur fréquence quelque peu martiale ?

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