Visite des monastères des Météores: au sommet des pitons sacrés
La gare de Sidiromikos Stathmos se trouve à la lisière de Kalambaka. Ce petit village, tas de maisons blanches aux toits de tuiles, en plein cœur de la Grèce, s’illustre davantage par son environnement que par le charme de ses rues. Il est niché dans le creux de formations géologiques très curieuses, sortes de gros doigts boudinés pointant le ciel, et sur lesquelles, comble de l’étrangeté, la vie humaine décida un jour de s’installer.
Oui, force est de le constater : on ne l’observe pas seulement à ses pieds, dans le village battu par le soleil, mais aussi à ses sommets. Là-haut, aux bouts des index, inaccessibles, on les voit, les monastères, les refuges des prêtres orthodoxes.
Curieuses formations géologiques
Certains éperons ont leurs parois si lisses que même un alpiniste aguerri s’y casserait les dents. Mais ce sont bien des monastères, parfois avec cours et jardins, qui se trouvent sur leurs cimes. Et on imagine bien l’effort que durent entreprendre les moines de l’époque pour se retirer, à l’écart du monde, loin de toute menace et de toute agitation, pour qu’enfin toute la terre leur foute royalement la paix.
Après s’être enfilé quelques mythos en guise d’introduction, on contourne le grand édifice naturel pour se rendre côté nord, dans le village encore plus petit de Kastraki. C’est là que nous avons réservé un camping pour la nuit.
La route à pied jusque-là est l’occasion d’observer davantage les formations géologiques des Météores. Chacune est une tentative artistique originale. En termes scientifiques, on parle de falaises détritiques, une roche sédimentaire composée de débris, formant des poudingues qui donnent aux pitons leur forme arrondie. Sur chacune des parois se lisent les différentes strates. Ces curieuses formations se dressent avec majesté au cœur de la vallée, composant, selon les mots de Jacques Lacarrière, « les Pachydermes broutant les abysses de la terre ».
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On imagine toute la variété de légendes que ce genre d’édifice peut inspirer. La mythologie du coin raconte que ces roches furent envoyées du ciel, d’où leur nom, pour permettre aux humains de s’y réfugier et de s’y recueillir.
En un sens, ce fut une réussite, avant que l’essor du tourisme ne rameute des hordes de bermudas-sandales au pas de leurs portes. Aujourd’hui, pas besoin d’escalader la paroi, mais mieux vaut avoir les jambes solides, car les escaliers sont raides et les marches nombreuses. Le tout sous un sacré cagnard si vous passez par là en été.
Les monastères
Megalo Meteoro, le Grand Météore
Il est le plus vaste des monastères. Il faut descendre un long escalier puis en remonter un second en z pour pénétrer dans l’édifice, et l’inverse pour y revenir. Sa taille, au mépris de toute discrétion, lui donne l’aspect d’une petite forteresse.
Dit monastère de la Transfiguration, il fut fondé par Anathase d’Alexandrie, une figure majeure de l’Église copte orthodoxe. On peut encore apercevoir son ermitage, modeste lieu de retraite niché dans le rocher. Il y vécut en ascète avant de bâtir l’église et les cellules pour accueillir moines et disciples.
Monastère Roussanou
Le monastère de Roussano est magnifique par l’élégance parfaite de sa fusion avec le piton rocheux. La plateforme sommitale est entièrement recouverte par l’édifice. Sa position centrale, entourée de gigantesques rochers et des chaînes montagneuses de Koziaka et de Pinde, permet un point de vue exceptionnel sur les Météores. Autrefois, on ne pouvait y accéder que par une échelle de corde, remplacée d’abord en 1868 par un pont en bois, puis en 1930 par un escalier en ciment. L’origine du nom de Roussano reste mystérieuse, mais fut peut-être inspiré du premier ascète ayant occupé le rocher au XIVe ou XVe siècle.
Monastère Saint-Nicolas
Construit sur un rocher étroit, le monastère Saint-Nicolas s’est développé de façon verticale, et ses bâtiments sont répartis sur plusieurs niveaux. En gravissant les marches, on tombe sur la chapelle Saint-Antoine et la crypte. Elle recelait jadis des manuscrits et des objets précieux. Au niveau supérieur se trouvent l’église principale, dédiée à saint Nicolas. Au dernier étage, le vieux réfectoire.
Monastère d’Ypapantis
Le monastère d’Ypapantis, aussi appelé monastère de la Chandeleur, est moins connu dans les Météores, car ne fait pas partie du « circuit des 6 monastères ». Il ne se visite d’ailleurs qu’avec un guide.
Ce monastère n’est pas perché sur un perron, mais creusé dans la roche, constituant un genre de grotte. Il fut fondé par les moines Neilos et Kyprianos et fut longtemps un lieu de recueillement éloigné des circuits touristiques. Accessible uniquement par un sentier depuis le Grand Météore, il reste le plus isolé et préservé. En son sein, se nichent des fresques macédoniennes.
Monastère Saint-Étienne
Le monastère Saint-Étienne (Aghios Stéfanos) se situe à l’extrémité sud des Météores. Il domine le village de Kalambaka. C’est le seul monastère accessible sans avoir à monter de marches, grâce à un petit pont relié directement à la route. Depuis 1961, une communauté de moniales vit en son sein.
Monastère de la Sainte-Trinité
Posé sur un rocher abrupt, le monastère de Sainte-Trinité (Agia Triada) constitue la photo parfaite des Météores. Ici, aussi, il convient de réaliser une longue descente suivie d’un escalier escarpé taillé dans la roche. Autrefois, on y accédait grâce à des échelles à cordes.
Datant de 1476, c’est le plus ancien des monastères. On y trouve une petite église en forme de croix, coiffée d’une coupole soutenue par quatre colonnes. La chapelle Saint-Jean-Baptiste, taillée dans la roche, conserve encore des fresques datant du XVIIe siècle. Jadis, il fut richement doté d’objets et de manuscrits. Le tout fut pillé pendant la Seconde Guerre mondiale.
Varlaam
Le monastère de Varlaam est aussi appelé « monastère de Tous les saints ». Lui aussi est vertigineux. Ses balcons donnent sur le vide, et on y accède via une petite passerelle.
Varlaam était un ascète, et serait le premier à avoir habité les lieux au milieu du XIVe siècle. D’ici, la vue sur les formations rocheuses est imprenable. Un autre promontoire, vierge de construction, se dresse parallèlement au Varlaam, uniquement séparé par un ravin. On peut se rendre à son bout, et profiter de la vue sans l’affluence.
La vallée de la Pénée
Je m’installe sur ce promontoire, face à un superbe panorama, endroit idéal pour prendre le temps d’observer. Et d’ailleurs, prenons ce temps, observons la belle vallée en face de nous. La Pénée est un fin lacet d’eau qui peine à apporter de la fraîcheur dans cette vallée exposée. La Grèce est réputée pour ses étés qui cognent, et chaque saison connait son lot d’incendies transformant des provinces entières en fumée.
Ici, la végétation demeure luxuriante. Une forêt s’étend entre les formations rocheuses, d’autant plus épaisse qu’elle est inaccessible, protégée par les sentinelles de pierre. Le monastère de Roussanou se trouve quelques kilomètres en contrebas. Il est en grande partie dissimulé, et seul un voyageur attentif eut été capable de le distinguer à l’époque où aucune route bitumée ne traversait le site.
C’est sur cette vue que nous clôturons notre visite des Météores. La façon la plus courte de revenir au village est de prendre un taxi. Toutefois, il existe des sentiers pédestres permettant de déambuler dans les montagnes.
Mon passage au Météores constituait une étape sur le retour d’un voyage plus long. Le temps limité, la fatigue, la chaleur et l’afflux touristique, entre autres, ont fait qu’on a surtout profité en surface du lieu. Pour en profiter davantage, il me semble primordial de s’y rendre en basse saison. Cela permet de visiter chaque monastère sans être étouffé par la cohue et de se promener dans la région sans être écrasé par la chaleur.
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